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Par vdvk le 20 Août 2014 à 09:32
Léo Ferré
LA MÉTHODE
Apprendre rien c'est difficile et délicat
Et compliqué et con et inutile
Czerny? D'accord!
Larousse? D'accord!
La Géo? D'acc!
La pharmacopée?
Demandez à mon père c'était un spécialiste
Il emportait avec lui des valises le sentiment barré du Codex
Des infusions particulières qui sait?
L'éternelle jeunesse?
- Et si je meurs?
Il est mort!
Apprendre rien? C'est Hamlet, tiens!
To learn or not to learn... that is... that is... c'est con
La méthode?
Seul sur un chemin de chèvre à la montagne
Au moment où il ne va plus y avoir d'arbre
Au moment où la végétation peut s'écrire facile
Sur une page de ton agenda
Et puis même pas à te frapper pour le téléphone...
Tu parles à voix basse et tu t'entends te répondre
C'est bath! Non! Le circuit fermé
- Allô? Le temps?
- Yes!
- And you?
- Pas mal pas mal pas mal...
Tu prends une pierre dans ta main
Personne n'y a jamais touché... tu te rends compte?
Une pierre vierge pour toi tout seul éternellement
L'adultère chez les pierres que tu marries
Comme ça très vite c'est rare c'est rare...
Une pierre ça s'accroche... comme les étoiles
Tu as déjà vu des étoiles à toi se barrer avec un particulier?
Dans une galaxie de passe?
Tu regardes un coq de bruyère qui passe en te faisant peur
Parce que le bruit que peut faire un coq de bruyère
Quand tu as la pierre en main
Et qui n'a jamais touché une main humaine
Et bien ce bruit est fantastique...
Ça fait fouou... flouou...
Comme Czerny... Écoute... Quel salaud!
Tout à coup une source pas loin du glacier
Et puis de fleurs sauvages
A se demander vraiment... Harlem?
Tu causes tu causes... Tu crois?
Des fleurs noires de la Débauche ou de l'Anarchie
Non... Des fleurs noires de pierre de l'Amour
La Méthode?
Apprendre tout par coeur, surtout la gueule des gens
Et puis, tout oublier, immédiatement, comme à l'école...
- Vous avez appris la gueule de grammaire?
- Ouais
- Alors?
- Elle est vieille!
- Comment ça fait?
- Je t'aime Tu m'aimes J'aime J'aime J'aime
Apprendre, oui, apprendre...
Sentir les fumiers avant de les apprendre
Dresser son nez faire des exercices particuliers
Le téléphone?
- Allô?
Et puis tout de suite fourrer son nez dans l'écouteur
Oh! la la la la...
- Il n'est pas là monsieur
- Comment?
- Allô? Je n'entends pas mais je sens je sens...
Et tu raccroches
Au début c'est difficile
On ne sait pas si tu écoutes ou si tu renifles
Et puis petit à petit...
Entre Dior et la merde
Il n'y a souvent qu'une question de circuit mal branché...
Je suis un OLFACPHONE
Je suis un vieux corbeau qui traîne sur les fils télégraphiques
Et j'en apprends des choses
Les fils télégraphiques c'est un peu le cabinet de la chose publique
Je n'ose pas décrocher la nuit parce que ça sent quand même
La Méthode?
ART.1 CASSER LES TÉLÉPHONES
Les autres? L'autre?
Les autres c'est facile: C'est toi multiplié par eux c'est clair?
Les autres? C'est tes pantalons enfilés par eux c'est clair?
L'autre? L'autre?
J'y reviendrai
ART.2 CASSER LES AUTRES
Quand tu t'es enfilé comme ça
Une peau de crocodile sur le sentiment
Alors on ne t'approche plus que par ouï-dire:
Ah! celui-là on ne sait pas qui c'est exactement
Et tu poursuis ton chemin ta cig ou ton chien
Si tu as le sens de la réverbération
Les chiens ne sont pas les Autres
Il fallait bien savoir un jour ou l'autre
Les chiens ça réverbèrent un quelque part
Qui est juste sur la bulle de l'Univers un peu en dehors
Ils sont un peu en dehors les chiens
Nous, nous bouillons dans l'Administration
Nous sommes des administratifs
ART.4 CASSER L'ADMINISTRATION
Tu as deux poings?
Frappe sur la table frappe la tête
Tu as deux poings?
Mets-les au bout de tes bras le long de ton corps
Et prends des loups par la main
Ton poing alors s'épanouira comme une fleur matinale
Le silence que j'ai perdu
Au bout de cette rue barrée
Ne m'a jamais été rendu
J'habite en-haut de ces pavés
J'y vois des pays trop marins
Des fleurs de filles délaissées
Et le système de ton bien
Allongées dans cette rue blême
Tu passais sur moi comme un char
C'était de la guimauve encarrossée de miel
Alors je m'abreuvais en regardant dedans
O les sources de brume en ces rues dévêtues...
Tu as deux yeux regarde en-dedans de toi
Et sors-toi par les yeux
C'est aussi ça Méthode: S'EXTIRPER
ART.5 S'AUTO-VOMIR
Et s'offrir en prime la salope de Cahors
Chacun a une salope quelque part
Moi j'en ai par-ci par-là et à Cahors
Je me souviens de ces lilas
Dont elle fleurissait ma maison
Avant que cette salope-là
Ne prenne sa vrille
Elle m'avait fourgué des fleurs
Histoire de montrer son bon coeur
Ben Dame! Un coeur il faut que ça brille
Y'a des gens que ça fait maronner
De ne pouvoir jamais entrer
Dans l'intimité des Artistes
C'était dans son genre à elle une artiste
Elle est entrée elle est entrée
Le trou de serrure où tu lorgnais
C'était ma cavale de la nuit
Et toi tu venais tapiner
En tapinois en tapis nuit
Dis-moi la salope de Cahors
Où traînes-tu ta gueule encore?
Sur quelle fosse à purin?
Sur quel poulaga en gésine?
Dis donc la voyeuse de Cahors
Sur quel fumier? Sur quel jardin?
Sur quel azur fais-tu ton deuil?
Toi l'amour tu le fais avec ton oeil
Et dire qu'elle me disait l'Autre
- Qu'est-ce qu'ils peuvent être con ces deux-là
Chacun a une salope quelque part
Moi j'en ai par-ci par-là et à Cahors
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Par vdvk le 24 Avril 2011 à 08:32
Léo Ferré
LA VIOLENCE ET L'ENNUI
Nous d'une autre trempée et d'une singulière extase
Nous de l'Épique et de la Déraison
Nous des fausses années Nous des filles barrées
Nous de l'autre côté de la terre et des phrases
Nous des marges Nous des routes Nous des bordels intelligents
O ma soeur la Violence nous sommes tes enfants
Les pavés se retournent et poussent en dedans
J'ai l'impression démocratique qui me fait des rougeurs
A l'extrême côté du coeur et des entrailles
J'entends par là mes tripes à la mode de Mai
JE VOUS COMMANDE D'ÊTRE BREFS ET COUILLOSIFS
J'ai le sentiment bref de ceux qui vont mourir
Et je ne meurs jamais à moins que à moins que
Je sais des assassins qui n'ont pas de victime
Qui s'en vont faire la queue pour voir le sang d'écran
Et cette pellicule objective qui pellicule sur le vif
Surtout ne pleure pas
Les larmes c'est le vin des couillons
Moi je ne pleure plus
Et je le dis bien haut bien tendre aussi et bien à l'aise;
Crevez-leur le paquet qu'ils portent sur leurs quilles!
Marx était un "hippie"
C'est pas comme en dix-sept, à la consigne,
Dans cette Russie rouge à la lénifaction
... Et personne jamais n'a été réclamer ce barbu stalingradé...
Quand je vois un stalinien je change à Stalingrad
Je sais des assassins qui ont le cran d'arrêt
Et qui sont beaux comme les cons qui vont voter
Des assassins assassinés et leurs manières
A ne jamais vouloir crever comme crevèrent les Communards
Mes frères
Et je le dis bien haut: il faut DÉCONSTITUTIONALISER le foutre
Et porter l'inconfort cousu dessous leur peau
A ces bourgeois qui se permettent de jouir, en outre!
JE VOUS COMMANDE D'ÊTRE BREFS ET CARTÉSIENS
Je sais des charmes bruns qui sont de sang caillé
Et qui se grattent comme on gratte une blessure
Ça vous ravive un peu de rouge, ça a l'allure
D'une légion d'honneur que l'on pardonnerait.
Ô ma soeur la Violence Ô ma soeur lassitude
Ô vous jeunes et beaux empêtrés dans vos livres
II faut faire l'amour comme on va à l'étude
Et puis descendre dans la rue
II faut faire l'amour comme on commet un crime
Ô ma soeur la Violence tes enfants s'analysent
Et du Guatemala s'en viennent des parfums
De sang et des Guatémaltèques allant s'analysant
Dans les ruisseaux de sang coulant comme la crème
La crème de la Révolution montant
Ô ma soeur la Violence Ô la fleur du boucan
II fait un bruit à rancarder tous les voyeurs
Et un bruit qui se voit ça vous a des couleurs
A vous barrer la vue pour des temps et des temps
Je sais des bises s'ennordant depuis l'Afrique
Le monde est court, la gosse, il faut tâter la trique
Dans le pieu, dans la rue, mais tâter de cet ordre
De cet ordre nouveau où germe le désordre
Le beau désordre des voyous au ventre lisse
Viens par ici la gosse un peu, que je t'en glisse...
De ma graine d'amour...
Qui gonflera dans toi comme un chagrin de carne
Sur le monde envahi de tant de muselières
Dans le Paris des chiens je vais l'âme légère
Ô ma soeur la Violence Ô ma soeur lassitude
Ô vous jeunes et beaux empêtrés dans vos charmes
II faut faire l'amour comme on va à l'étude
Les yeux vers les jardins où fleurissent les armes
Des armes, comme une esthétique de la solitude
Des armes, comme une sinistre compo d'angliche
WHAT DO YOU MEAN, GUN?
Je sens que nous arrivent
Des trains pleins de brownings, de berretas et de fleurs noires
Et des fleuristes préparant des bains de sang
Pour actualités colortélé
Le sang ça s'ampexe tout ce qui y'a de bien
Le sang c'est rentable dans la technicoloration
Et je te ferai voir un sang vert quand il sera question de questionner
Je sais des fleurs d'amour qui polennent les blés
Et qui vous font un pain que l'on mange à genoux
Un pain de chair vivante et que l'on aimerait
Comme on aime une enfant que cache ses atouts
Et qui les touche un peu comme on caresse une arme
Un doigt sur la gâchette et le reste aux abois
Et que s'irise alors ta violette de Parme
Enfant mauve de mon silence et de ma loi
Des armes, comme une esthétique du pain sur la planche
Des armes blanches comme l'aube blanche à Paris
Cette aube comme le foutre de l'absence
NOUS SOMMES ABSENTS, MESSIEURS!
L'amour toujours l'amour Ah! cet amour malade
Comme une drogue dont on ne peut se dédroguer
Comme une drogue à laquelle je me soumets
Je suis un trafiquant d'amour...
Des armes, comme un sourire de l'autre côté de la tête
Comme une façon de désarmer
Comme un chien qui vous aime
Des armes qui vous lèchent, qui vous sortent, qui vous bercent
Des armes pour inquiéter l'inquiétude
Et puis le Code de la peur à distribuer
A tous ceux qui habitent avec la peur ou que la peur habite
Art. l J'ai peur
Art. 2 J'ai peur
Art. 3 J'ai peur
Art. 4 Où sont les toilettes?
Des armes, comme une esthétique de la solitude
Quand on est seul et armé on n'est plus seul
Quand on est seul et désarmé on fait une demande pour être CRS
L'amour toujours l'amour Ah cet amour serein
Cet amour qui vous monte à la bouche comme une grenade
Qu'on ferait bien éclater dans quelque ventre passant
Dans quelque ventre curieux, oisif, en mal d'amour
Des armes, comme un planning de la résurrection
Et quant aux armes blanches, on pourrait les teinter de rouge
Dans une teinture particulière et à la portée de toute portée
Nous d'une autre trempée et d'une singulière extase
Nous de l'Épique et de la Déraison
Nous de l'autre côté de la terre et des phrases
O ma soeur la Violence O ma soeur de Raison
Au quartier des terreurs des enfants se sont mis
A brouter des étoiles
La Voie Lactée s'amidonnait dedans leurs toiles
Et la carte du ciel dans ce quartier de France
Indiquait aux passants la route à ne pas suivre
II brumait dans le ciel des paroles de givre
C'était d'un cinéma nouveau et d'une danse
Qu'on ne dansait plus avant longtemps. Nanterre
Se prenait pour Paris et le tour de la terre
Se faisait sur lin signe, une pensée de fièvre
Un désir de troubler les fleurs et les manières
Une particulière oraison, un. sourire,
À mettre les pavés à hauteur d'un empire
Le sable des pavés n'a pas la mer à boire
Ça sent la marée calme dans les amphis troublés
Des portés de secours sont ouvertes là-bas
II suffit de pousser un peu plus, rien qu'un geste...
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